Par cette phrase, Jésus nous livre son désir le plus profond, partagé avec son Père.
Jésus veut nous partager sa vie !
Bizarrement, pour annoncer l’institution de l’Eucharistie, l’apôtre Saint Jean, dans son évangile,
ne prend pas la peine de nous faire le récit de son institution. Au moment où il écrit, il sait que tous les chrétiens en écoutent déjà le récit dans un des trois autres évangiles.
Mais Jean, de façon très solennelle, nous en livre la motivation profonde :
Avant la fête de la Pâque, Jésus, sachant que le Père a tout remis entre ses mains,
qu’il est sorti de Dieu et qu’il s’en va vers Dieu,
sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père,
Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.
Jean nous livre la motivation profonde du Christ durant toute sa vie terrestre :
Donner aux hommes d’avoir part avec Lui ! Dieu veut nous partager sa vie divine,
et il prend l’initiative de venir nous purifier de nos péchés pour nous rendre digne de Lui.
A la Cène, en instituant l’Eucharistie et le Sacerdoce,
le Seigneur Jésus atteint le sommet de son existence :
toute sa vie terrestre culmine dans le don total de sa vie aux hommes par amour du Père.
Ce qui va commencer aussitôt après la Cène avec l’arrestation, la passion et la résurrection,
il faut que toutes les générations à venir puissent en profiter et y avoir accès.
Dieu vient comme se fondre en nous pour ne faire plus qu’un avec nous.
Le sens profond du mystère de Pâques, c’est que Dieu tient à sauver les hommes,
qu’il a créés en les appelant tous à la pleine communion avec Lui.
Pour les arracher à la séparation d’avec lui consécutive au péché,
Dieu s’abaisse par amour en se faisant homme, en se donnant lui-même, jusqu’à la mort de la Croix.
Si nous comprenions de quel immense désir Jésus veut se donner à nous sous forme de nourriture,
nous en profiterions chaque jour, comme nous le disons dans le Notre Père !
Nous ne nous contenterions pas seulement de la communion dominicale.
Mais allons jusqu’au bout de la logique du partage de la vie du Christ.
Ce qu’il a fait pour nous, il tient à ce que nous le reproduisions à notre tour pour nos frères.
Jésus tient à le manifester et à le faire rentrer dans le coeur de ses disciples :
Vous m’appelez “Maître” et “Seigneur”, et vous avez raison, car vraiment je le suis.
Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds,
vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres.
Le lavement des pieds nous donne le sens de ce que Dieu attend de nous comme participation à la messe : une identification toujours plus grande au Christ serviteur.
C’est dans la communion que je puise la force du service de mes frères.
D’une façon très spéciale, pour continuer à se rendre présent personnellement aux hommes pour leur partager sa vie tout au long de l’histoire, en même temps que l’Eucharistie, Jésus a institué aussi le Sacerdoce.
Il a appelé certains de ses disciples à le laisser vivre en eux pour se partager avec nous tous : ce sont
les prêtres.
C’est l’approfondissement du mystère de l’Eucharistie mieux comprise et mieux vécue,
dans nos familles et dans notre paroisse, qui favorisera l’émergence de nouvelles vocations sacerdotales.
Un prêtre, c’est un homme qui peut entendre l’appel du Christ à tout quitter pour le suivre,
car il a compris le besoin impérieux de la célébration de la messe pour que tous les hommes puissent profiter de l’amour du Christ : Faites ceci en mémoire de moi !
Le sacerdoce est une réponse libre et enthousiaste à cet appel qui ne peut venir que du Christ lui-même.
Le prêtre est le serviteur de ses frères et de ses sœurs dans leur relation avec Dieu.
Le prêtre poursuit à travers le temps et l’espace le mystère de l’incarnation.
Dieu a voulu se rendre présent aux hommes de façon visible et humaine.
Le prêtre doit être une humanité de surcroît pour le Christ.
Son service est immense, inouï, car il n’est en rien lié à ses mérites personnels,
il est pur cadeau, il est association aux sentiments, au regard, à la pensée et à l’agir du Christ même.
On ne peut pas s’attribuer une telle vie,
on ne peut qu’en recevoir l’appel avec une infinie gratitude et reconnaissance.
Chaque année,
améliorons notre perception du mystère du Christ agissant et vivant dans ses prêtres.
C’est la qualité de ce que nous attendons des prêtres qui fera la sainteté des prêtres que Dieu nous enverra. Car Dieu ne se moque jamais de nous. Nous avons les prêtres que nous méritons.
Sans aucune idéalisation d’un homme fragile qui garde ses défauts et reste pécheur,
sachons reconnaitre dans la foi tout ce que Dieu veut nous donner à travers les prêtres.
Après les révélations monstrueuses des péchés de certains prêtres,
prions pour la purification et la sanctification des prêtres du monde entier.
N’ayez pas peur :
demandez directement que vos prêtres deviennent des saints selon le coeur de Dieu.
Vous plairez au Seigneur Jésus, qui le veut encore plus que vous.
En lavant les pieds de 6 d’entre vous ce soir,
je me rappelle concrètement ce pourquoi le Seigneur Jésus m’a envoyé au milieu de vous.
Je suis au service de la purification de vos âmes afin que vous puissiez avoir part tout entier à la vie du Christ.
Je peux dire simplement, au bout de 33 ans de sacerdoce, que j’ai eu les plus grandes joies de ma vie en confessant, en donnant le pardon et la paix du Christ à un nombre d’âmes que Dieu seul connait.
Et tant que le Seigneur me gardera en vie,
je serai heureux de poursuivre ce service de sa miséricorde si bouleversante.
Ce geste décrit aussi de façon très percutante le style des relations qui doit exister entre nous :
C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous.
Développons toujours plus la charité et le don de nous-mêmes pour nos frères.
Oui, Jésus veut rendre présent son amour fou pour les hommes de ce temps
à travers chacun de nous personnellement,
et à travers notre paroisse comme famille visible de Dieu à Laval.
Amen.